Andre Green
La lettre et la mort
promenade d'un psychanalyste à travers la littérature, Proust, Shakespeare, Conrad, Borges--
- Éditeur
- Denoel
- Année
- 2004
- Ean
- 9782207254349
Présentation
Les rapports entre la littérature et la psychanalyse sont aussi anciens que la naissance de celle-ci. Dans la lettre de 1897 où Freud rapporte à son ami Fliess avoir repéré dans ses propres rêves la marque de sentiments d'attachement à sa mère et d'hostilité à l'égard de son père, c'est la tragédie de Sophocle ?dipe Roi qui se présente à son esprit comme la «preuve» de l'universalité d'une telle disposition. Enchaînant sur sa découverte, Freud reconnaît ensuite dans Hamlet la forme plus masquée de ce qui sera nommé plus tard le complexe d'?dipe. Il n'y a donc rien d'étonnant à ce que, depuis Freud, les psychanalystes se soient penchés, avec des bonheurs divers, sur des auteurs ou de grandes oeuvres de la littérature: de la princesse Marie Bonaparte à Jacques Lacan, ou d'Otto Rank à Didier Anzieu. Dans cette constellation, André Green occupe une place éminente. Son intérêt pour le théâtre - la tragédie grecque, Shakespeare, les classiques français - le pousse dès 1969 à publier une belle étude sur le complexe d'?dipe dans la tragédie (Un ?il en trop), suivie en 1992 d'un recueil d'essais incisifs, La Déliaison. La Lettre et la Mort est une série d'entretiens, diffusés en partie sur France Culture et menés par la romancière Dominique Eddé, qui connaît parfaitement les travaux de son interlocuteur. Pourquoi La Lettre et la Mort? Parce que cette polarité situe l'horizon dans lequel Green tente ici de situer la création littéraire. Dominique Eddé cite le fameux vers de la première Elégie de Duino de Rilke: «Car le beau n'est que le commencement du terrible que nous parvenons encore à supporter?» Ce terrible, Green dirait que c'est sans doute le ça, c'est-à-dire ce qu'il y a de plus sauvage, de plus indompté et d'inconscient en nous, ce qu'il y a de plus effrayant aussi. L'écrivain, dont l'effort conscient d'écriture serait centré par la beauté, serait en même temps habité par ce terrible - dont la mort serait le visage ultime - auquel son souci de vérité le pousserait à se confronter. L'écrivain, autrement dit, serait un être naturellement porté par son intuition à s'intéresser à des mouvements intérieurs qu'il représenterait sous le voile d'une fiction destinée à rendre ce terrible supportable.